"L'écriture est le meilleur moyen de s'exprimer sans être interrompu". (Jules Renard)
Libellés
- Absurde (1)
- Economie (1)
- Faits divers (3)
- Humour (2)
- Kulture (1)
- Les Cénobites Tranquilles (1)
- Les Nouveaux Aristocrades (4)
- Mascarade (1)
- Politique (4)
- Pub décalée (1)
- Société (2)
- Sports (1)
- Vol au-dessus d'un nid de cocus (1)
- Voyage de Notes (3)
mardi 22 novembre 2016
vendredi 24 juin 2016
La "Marseillaise" des footballeurs
La « Marseillaise» des
footballeurs
Rappelez-vous, le sujet a déjà fait polémique
à plusieurs reprises : les joueurs de l’équipe de France de football ne
chantent pas la Marseillaise lorsqu’elle est jouée à l’occasion de rencontres
internationales ; c’est un fait, ils ne la chantent pas – même si certains
d’entre eux la fredonnent vaguement car ils savent que pendant l’exécution, ils
seront vus en gros plan sur les écrans de télévision. Et à l’avenir, il n’y a
pas de raison que ça change tant que le gros de la troupe sera composé d’une
bande de petits mercenaires, starlettes de banlieue grassement payées et
ridiculement adulées qui, pour la plupart, jouent habituellement dans des clubs
non français pendant le reste de l’année. A vrai dire, ils se fichent de
l’hymne national comme de leur premier saroual. Les bonnes consciences vous
diront qu’ils sont français et, qu’à ce titre, ils devraient chanter cet hymne haut et fort.
Et bien non, il n’en est rien et, au fond, c’est normal car, pour eux, il ne
s’agit pas de jouer pour les couleurs de la France mais pour leurs propres
couleurs, pour leur prestige individuel et pour leurs porte-monnaie. C’est
d’ailleurs ce qui explique les résultats mitigés de cette équipe car,
individuellement, ces joueurs sont talentueux mais ils pêchent par un manque de
cohésion et de ciment. On a l’impression qu’ils se passent le ballon, non pas dans
un souci de jeu collectif mais parce qu’ils sont contraints et forcés de le
faire sous la pression des joueurs adverses. C’est lamentable !
Je dois avouer que moi non plus je ne chante
pas la Marseillaise, mais c’est pour des raisons totalement différentes qu’il
serait trop long ici de développer. Peut-être une autre fois…
Et puisque nous sommes en pleine compétition
de l’Euro de football, je saisis l’occasion pour leur proposer des paroles
appropriées à leur statut. Les voici :
C’est quand
qu’ell’ commenc’ ta parti-i-e
Le jour de
foire est arrivé.
Y’en a marre
de ta comédi-e
Et ton dard
sans gland est levé (bis)
Entendez-vous
dans ces tribunes
Mugir ces
pauvres franchouillards
Qui viennent
jusque dans nos douars
Nous gonfler
et nous casser les burnes.
Aux larmes,
les souchiens !
Suffit les
bataillons !
Crachons,
pissons
Sur la
prairie
Filez les
picaillons !
Peut-être
que celle-là, ils la chanteraient à tue-tête… !
jeudi 11 février 2016
Puy du Fou: pas de Fleur ni de Pellerin pour la culture!
Puy
du Fou : pas de Fleur ni de Pellerin pour la culture !
Madame Chantal Delsol a raison
lorsqu’elle qualifie le Puy du Fou de « samizdat » (mot russe qui n’a pas d’équivalent en langue
française et qui désigne un ouvrage ou une œuvre mis à l’index mais que tout le
monde s’arrache en circulant sous le manteau). A cet égard, le mot pourrait
avoir un bel avenir en France tant des exemples de samizdats se multiplient…Il
en va ainsi du Puy du Fou…
Voici
trente-huit ans que cette entreprise artistique existe avec des débuts plutôt
timides, s’exprimant avec des moyens, disons-le, de fortune – mais qui,
doucement, s’est développée d’année en année, sans subventions ni subsides
politico-médiatiques ; c’est suffisamment rare pour qu’on ne le mette pas
en avant. Il y a tellement d’initiatives (notamment sous couvert d’associations dites culturelles),
toutes – ou presque – les unes plus médiocres que les autres qui vivotent dans
ce pays grâce à des subventions démesurées par rapport à l’intérêt qu’elles
présentent. Donc, nous sommes en présence de ce qu’on peut appeler - sans
exagération - une belle réussite historique, artistique, culturelle et sociale. J’insiste sur ce dernier
qualificatif car, comme on peut le constater lors d’une visite dans ce parc
d’attraction, toutes les catégories sociales de France et d’ailleurs sont représentées,
sans parler des âges allant des bambins en poussettes jusqu’aux papis et
mamies …en poussettes également ! et avec de véritables fans
participants qui, pour rien au monde, ne rateraient une saison de bénévolat au
Puy du Fou. J’ai rencontré des gens de Hollande (non pas des gens du
gouvernement, comme vous pourriez le croire, non, des Néerlandais !) qui
venaient tous les ans passer six mois en Vendée dans un mobile home pour être à
pied d’œuvre, c’est dire… Le puy du Fou fait l’unanimité, partout. Et j’en
tiens pour preuve les nombreux oscars qu’il a obtenu depuis quelques
années : Thea Classic Award, meilleur parc du monde ; Applause Award,
meilleur parc du monde ; Parksmania Award, meilleur parc d’Europe ;
quand, enfin, l’IFOP révèle que, depuis trois ans, le Puy du Fou reste le parc
préféré des français. Partout. Tout le monde. Pourtant, il existe une minorité
de récalcitrants, d’hermétiques, de sectaires, de ségrégationnistes qui ne
disent pas que le Puy du Fou est nul et sans intérêt (encore heureux !),
mais qui ne veulent pas au moins venir le visiter, uniquement pour voir
pourquoi il plait à un si grand nombre, ne serait-ce que par curiosité afin de
pouvoir en parler en connaissance de cause. Non, personne, à commencer par le
gouvernement et, plus précisément, par notre ministre de la Culture et de la
Communication qui, par sa fonction, devrait s’intéresser à tout évènement
artistique et culturel marquant. On se demande pourquoi la Fleur de Culture n’a
pas encore pris son bâton de Pellerin pour venir, même à titre privé, assister
à ce spectacle. Oh, on ne lui demande de débarquer en grandes pompes et d’embrasser Philippe de Villiers sur la
bouche en lui disant : « Ah, Philippe, tu es un génie d’avoir conçu
et organisé une telle entreprise qui fait la gloire de la France ! »
Non ! Et, en fait, il y a deux raisons majeures à cela :
La première est d’ordre politique car,
faisant partie d’un gouvernement socialiste, elle a dû recevoir des ordres de
sa hiérarchie de ne pas prêter une quelconque attention à quelque manifestation
que ce soit émanant de gens ou d’idées qui ne comportent pas
l’estampille : « Norme NF Valeurs de la République 2012 »,
et elle obtempère. Son appartenance passée à des clubs tels que « le
Siècle » ou « Fondation Royaumont » n’est pas non plus étrangère
à cette désaffection idéologique…
La deuxième est d’ordre physiologique
et intellectuel. Loin de moi l’idée que Madame Pellerin manque de matière
grise, d’ambition et d’opiniâtreté. Elle a probablement bien des cordes à son
arc et elle était certainement plus à son affaire quand elle s’occupait des
affaires liées au numérique.
Mais comment voulez-vous qu’une personne née en
Corée du Sud, aussitôt orpheline de père et de mère, puis adoptée à l’âge de six
mois par un couple de français puisse, arrivée à l’âge adulte, créer et entretenir
un lien affectif profond et sincère avec l’histoire et la culture de son pays
adoptif même si elle lui voue une immense reconnaissance ? Les medias ont
récemment glosé à propos de son « ignorance crasse » car elle ne
put citer aucun titre parmi les livres de Patrick Modiano, mais cela n’avait
qu’une valeur symbolique et n’était pas très représentatif d’une carence
culturelle. Personnellement, de lui, j’ai lu «Voyage de Noces » mais je
dois à la vérité de dire que je ne suis pas allé jusqu’au bout du voyage et,
pour être franc, je préfère encore les chansons de son album « Fonds de
Tiroirs » qui, au moins, ont l’avantage d’être réellement ringardes et
décalées. En revanche, j’ose espérer qu’elle aurait été en mesure de citer au moins
une œuvre de Victor Hugo, mais on ne lui a pas demandé ! Peu importe,
l’affaire Modiano montre quand même qu’elle laisse planer un doute dans
l’opinion sur ses réelles aptitudes à assumer les responsabilités d’un tel
portefeuille. C’est préoccupant.
Aussi,
afin de lui permettre, à l’avenir dans d’autres sphères, de répondre à des
colles que ne manqueront pas de lui poser des journalistes mal intentionnés, je
lui propose le petit vademecum suivant concernant des grands classiques
français et européens :
Tout
d’abord, le Puy du Fou est un mont
d’Auvergne, ancien volcan, dans le cratère duquel, il y a fort longtemps, un
fou de Saint-Flour s’était précipité en affirmant qu’il se retrouverait aux
Antipodes quelques jours plus tard. Depuis, on dit que certains soirs d’été, dans
la brume claire obscure, on peut
apercevoir une fumée qui s’élève du cratère en volutes harmonieuses prenant une
forme humaine et dont on dit que c’est l’âme errante du Fou du Puy…
Modiano n’a jamais été un romancier, c’est un lac
italien propice aux voyages de noces et sur les rives duquel les oiseaux lyres
font escale en hiver dans leur grande migration nord sud…
Les
Cathares sont des nomades vivant en autarcie dans le midi de la France avec
cependant des moyens financiers colossaux, ce qui leur a permis d’acquérir,
entre autres, le club du Paris Saint-Germain…
Le
foie gras, en France, remonte à l’époque gallo-romaine. A Rome, au V°
siècle av JC, lors de l’attaque menée par les gaulois contre les romains, les
oies du Capitole donnèrent l’alarme par leurs cris faisant échouer ainsi la
manœuvre gauloise. De retour au pays, les gaulois décidèrent de gaver les oies
pour les empêcher de caqueter de façon intempestive...
Maginot
est le nom d’une ligne de produits parapharmaceutiques, créée en 1928 par le
Docteur Maginot, qui, selon le créateur, permettait une meilleure résistance
physiologique aux agressions bactériologiques venues de l’étranger. Pendant de
nombreuses années, la Ligne Maginot a enregistré un franc succès dans
l’hexagone mais quelques faits marquants ont depuis démontré l’inutilité de ses
produits…
Clovis
était un fameux serrurier dont la réputation internationale s’est faite par
la mise au point de la première ceinture de chasteté à fixation rapide et
inaltérable. Son invention fit l’objet d’une publicité qui subsiste encore de
nos jours : « Avec Clovis, rien ne rentre, ni clou, ni vis et ça
tient ! ».
Frédéric
Chopin mangeait des biscottes au petit-déjeuner parce qu’il avait Aurore
Dupin ! (Hihihi !)
Le
Cirque de Gavarnie est le plus ancien cirque familial de France. Sa
particularité est qu’il n’est pas itinérant. Il peut s’enorgueillir de montrer
des animaux sauvages tels que des loups, des mouflons, des bouquetins, des
rapaces…et, pour assister aux représentations, il faut y aller à pied, à cheval
ou…à ski !
J’espère que ce vademecum lui
servira de viatique dans ses nouvelles fonctions…
Bon
vent !
Lyconide
10 février 2016
Lyconide
10 février 2016
vendredi 8 janvier 2016
Water...loo, porte pleine!
Water…loo
(1) , porte pleine !
L’occasion
de parler de « prout » est suffisamment rare pour ne pas la rater
lorsqu’elle se présente ! Je veux dire d’en parler avec humour et, dans
l’affaire qui va suivre, les motifs de cette évocation sont plutôt d’ordre socioculturel
et, par extension, politique.
Un jour que je
me rendais depuis Paris aux USA, précisément à Nouillorques, comme disait
Jacques Perret, je dus faire escale à Londres, au fameux London-Heathrow
International Erport : en abrégé, LHIE… ! Ces grands aéroports
évoquent assez bien la complexité du corps humain : toujours bien
charpentés, longs couloirs, boyaux interminables – très encombrés aux heures de
pointe -, escalators, tapis roulants, panneaux lumineux aux pictogrammes
accessibles à tous, du plus brillant esprit au plus sombre crétin, centres de
contrôle – plus ou moins nerveux - , points de rencontre et d’innombrables
satellites affublés de noms techniques et courts tels que : check-in,
gates, desks, halls, hubs,…dont la prononciation s’apparente plus à
l’éructation ou au borborygme qu’au langage familier du pèlerin de Saint
Jacques de Compostelle. Il faut bien avouer que, dès la sortie de l’avion par
le biais d’un de ces boyaux articulés, le panneau « Transit
passengers » m’avait mis sur la voie vers un appendice dont je ne
connaissais pas l’issue mais qui avait pour moi quelque chose de prémonitoire.
Je me demande à quoi pense le passager en général lorsque, l’œil hagard et
vitreux, son bagage à main à bout de bras – ce qui est logique - ou qu’il
traîne comme un chien docile, il suit de cette façon les méandres
insolites de ces énormes labyrinthes
métalliques et bétonneux : il pense : « Terminal C, Hall 5,
Gate 37 », et il ressasse ces trois périphrases tout au long de ce
Golgotha climatisé et aseptisé, sans sueur ni poussière. Lorsque le panneau « Terminal C» apparait avec une flèche indiquant la droite, il pense : « Ah, terminal C, à
droite », mais anxieux et incrédule, il préfère une confirmation de
l’évidence à une bévue engendrée par un accès soudain d’orgueil incontrôlé.
Le pèlerin de Saint Jacques peut, parfois, y perdre son latin...
Personnellement, je préfère laisser mon esprit traîner par le regard au travers
des grandes baies vitrées sur les espaces extérieurs gagnés par ces
installations massives et impersonnelles. Qu’y avait-il en ces lieux à vent
avant ? Par quel type de mammifères de chair et d’os étaient-ils
fréquentés avant d’être colonisés par les grands oiseaux bourrés de titane et
d’informatique contrôlés aux alentours par la tour de contrôle ? Le petit
ruisseau, prisonnier entre deux rives d’asphalte, au bord duquel quelques
mulots se désaltèrent sans être effarouchés par l’assourdissant vrombissement
des monstres décollant était-il le repère de couples amoureux en quête de havre
propice à leurs entrelacements enfiévrés ? Ces grands espaces
accueillaient-ils naguère les vaches laitières de Paul Stewart avant qu’ils n’accueillissent les
investisseurs du London Council prenant les usagers du transport aérien pour
des vaches à lait ? Les vaches de Paul Stewart bénéficiaient d’une réputation
dépassant les frontières du Surrey pour la qualité de leur lait et elles ne se
doutaient pas un quart de seconde que, un jour, leurs prés seraient ainsi
livrés aux circonvolutions de jumbos pressurisés. Et pourtant, en matière de
pressurage, elles savaient de quoi il en retournait, mais je pense qu’elles se
fichaient bien de ce qui pouvait germer dans le crane des ingénieurs de
l’aéronautique, du moment que l’herbe, elle, germait, le reste….Elles se moquaient
pas mal aussi des futurs passagers en transit n’ayant au fond de préoccupation
majeure que pour – si je puis dire- leur transit passager !
Les vaches de Paul Stewart bénéficiaient d’une réputation
dépassant les frontières
du Surrey...
Un panneau
lumineux de lettres blanches sur fond bleu « Toilets » me ramena à la
dure réalité des choses concrètes et quotidiennes. L’obliquité de la flèche m’imposa
un changement de file à couper le flot des attaché-caisses ventripotentes. En
arrivant devant les portes du « Lieu où le Roi – paraît-il - va
seul », quatre portails surmontés de panneaux signalétiques ad hoc
s’offraient à ma convoitise : « Ladies »,
« Gentlemen », « Kids », « Others » !
Je restai un instant perplexe devant le « Others »…Y aurait-il autre
chose sur terre que des hommes, des femmes et des enfants ? Je connais
suffisamment bien l’engeance britannique pour n’être jamais trop surpris par
son excentricité rarement téléphonée, mais là, je dois avouer que je restais
interloqué. Heureusement, les pictogrammes – dont je parlais plus haut - me
révélèrent que le fourre-tout « others » regroupait : nursery,
garderie de chien et autres services aux handicapés… ! Bref, dans ces
conditions, je fis mon entrée chez les « Gentlemen », mais,
vous vous en doutiez !
Sacha
Guitry disait que, au théâtre, il fallait réussir son entrée et ne pas rater sa
sortie, le reste avait peu d’importance. Je partage assez cette assertion,
aussi, je voulus la confirmer en tournant la poignée de façon volontaire mais
sans affectation particulière et j’entrai. Je ne pourrai jamais dire si mon
entrée fut réussie car la salle était vide ; elle présentait une configuration assez courante –
ce qui dans certains cas urgents peut avoir un avantage incontesté – avec une
déco assez bien dans le ton de sa destination : des
murs marron-orangés, des stalles aérées équipées de portes de bois
mélaminé d’un jaune pisseux avec, sur la
droite, une batterie d’urinoirs à la mine
piteuse *. Le tout conférait aux lieux une note très tendance. Au-dessus,
sur l’intégralité d’un des pans de mur, des châssis d’ «alu brossé »
passablement embués laissaient filtrer les rayons d’un pâle soleil de
mi-saison : « l’ombre était spatiale, aduste et salmonelle »
aurait pu dire Victor Hugo…s’il avait été présent, bien entendu. Un rapide
coup d’œil circulaire me permit de constater que toutes les stalles étaient
inoccupées sauf une ; j’en choisis une assez éloignée de celle-ci, pour
des raisons bien légitimes de confidentialité, comme on dit dans les agences
postales. Je pense que vous avez été confronté(e) à ce type de situation et
vous serez bien d’accord avec moi que ces cloisons dont la partie inférieure se
trouve à quelque vingt centimètres du sol et l’absence totale d’une manière de
plafond, n’assurent pas de façon radicale l’intimité qu’on est en droit
d’attendre lorsqu’on est prêt à se déboutonner ! De plus, l’absence quasi
certaine de patère ne facilite pas la manœuvre générale, sur quoi, en se
rabattant sur l’utilisation de la poignée de porte comme clou de secours, vient
se greffer la hantise que quelqu’un puisse inopinément venir la tourner et
faire tomber le pardessus qui tient en équilibre…et, à propos de rabattant, je
n’en dirai pas plus ! Ce dernier détail me fit songer à ce collectionneur
de cuvettes de cabinets qui se targuait de posséder la plus belle et la plus
complète collection de cuvettes au monde ; il avait tout : la cuvette
classique de porcelaine blanche ; la cuvette Grand Siècle dorée à l’or
fin ; la cuvette Rothschild, plutôt argentée ; la cuvette rococo,
très chargée ; la cuvette Art Déco, aux lignes très épurées ; la
cuvette de campagne en bois avec couvercle coordonné ; la cuvette
spartiate dite « à la Turque » ; la
vespasienne ; la cuvette ottomane qui se résumait à un caillou
parfaitement lisse ; la cuvette « Retour d’Egypte » plutôt
m’as-tu vu ; la cuvette esquimau sur laquelle on ne s’attardera pas ;
la cuvette Lamartine avec les quatre premiers alexandrins du Lac gravés dans la
porcelaine ; la cuvette Woodstock – pièce d’origine dont je ne
m’attarderai pas sur l’état - ; la cuvette Picasso, énormément bariolée –
Amateurs, celle-là, il faut bien que vous vous l’arrachiez - ; la confidente
berrichonne, dite « la doublette », qui permet de se parler pendant
l’opération sans se voir, très prisée, paraît-il, par George Sand ; la
cuvette Manhattan Streamline, joyau des années 80, comportant une batterie de
jets coquins, qui fit fureur à New York dans les milieux homosexuels ; il
avait tout…ou presque, car, un jour, un ami proche lui fit remarquer qu’il
manquait à sa collection une pièce rarissime : la cuvette sibérienne.
Notre collectionneur, piqué au vif, fit de multiples démarches pour savoir où
il pouvait dénicher cet article qui parachèverait magistralement son
exposition. On lui indiqua, dans les milieux autorisés, que ce type de cuvette
était encore d’usage dans les régions septentrionales de la Sibérie, quelque
part entre les fleuves Ob et Ienisseï. Après plusieurs excursions sur ces
terres austères, glaciales et quasi désertiques, il finit par repérer, sur les
indications assez approximatives d’autochtones éberlués, un vieil anachorète
vivant dans une isba reculée qui l’invita à venir découvrir l’appareil.
L’entretien fut bref en raison de la barrière de la langue – j’allais écrire la
barrière de corail, mais c’eut été une erreur géographique impardonnable - mais grâce à
la richesse du savoir associée à la dynamique du lucre, le moujik
s’empressa de montrer à notre homme sa cuvette sibérienne.
Il s’agissait de deux perches assez
robustes en bois de boulot d’environ deux mètres de haut, et, pour épater le
collectionneur, le moujik tenta d’en expliquer le fonctionnement avec moult
mimiques. Il sortit de l’isba, mit les perches sur le dos et fit quelques pas
dans la neige. Soudain, il s’immobilisa, se tourna vers l’acheteur et, les yeux
écarquillés, fit le geste, plié en deux, de celui qui est pris d’une diarrhée.
Il empoigna l’une des perches et la ficha dans la neige ; il enleva sa
veste et, après l’avoir accrochée au sommet de la perche, s’accroupit comme
pour mimer l’exécution du besoin capital naturel ; puis, il se releva, la
mine réjouie et les bras écartés, comme s’il voulait dire : « Et
voilà ! » L’autre, montrant du doigt la seconde
perche : « D’accord, d’accord !…mais celle-là, à quoi
sert-elle ? ». Alors, comme pour réparer cet oubli, le moujik attrapa
la seconde perche, se remit en situation et, dans un rire un peu plissé, ajouta
dans un anglais très utilitaire tout en agitant son bâton autour de lui : « Oh,
yes ! This one..for wolf… lot of wolf here !”....
La Confidente berrichonne, dite "La Doublette".
Bref, pour
revenir à nos boutons, l’installation peut prendre un certain temps quand,
enfin, vous êtes prêt. C’est le calme plat ; on a l’impression de se
trouver dans la campagne toulousaine par un après-midi torride de la mi-août
alors que bourgeonnent à l’horizon de gros cumulus bien menaçants. Un instant,
ma mise en jambes fut interrompue par une annonce diffusée par le haut-parleur
encastrée dans le faux-plafond des latrines. Une voix suave et veloutée
distilla un rassurant mais non moins pressant: « Your
attention please ! Passengers to La Havana, flight
BA 119, immediate boarding gate 28.” Oser faire allusion à Cuba étant donné la
posture dans laquelle je me trouvais au même instant relevait de la provocation
pure et simple ! Aussi, sans précautions oratoires et, me croyant seul,
sans avoir recours au désormais historique : « Messieurs les
anglais, tirez les premiers », ce qui devait arriver arriva :
j’ouvris le feu ! Le crépitement sec de la salve eut, dans ces lieux
d’aisance, d’étranges résonances et fut suivi d’un écho
inattendu : « Well…not bad ! ».
Sans doute surprise par cette ouverture des hostilités sans déclaration de guerre préalable, la personne qui venait
d’apprécier mon envoi devait donc bien se trouver dans la cabine occupée et
l’usage de la litote me rappela cruellement que j’avais bien les deux pieds sur le sol d’Albion. Cette
apostrophe fut suivie d’un laps que j’estime à cinq secondes durant lequel il
ne se passa rien, comme si ce genre de dialogue nécessitait une quelconque
réflexion. Puis, la voix off reprit: « You know, I
can do much better than you!” Et de fait, l’ennemi qui, comme tous les
ennemis, avançait masqué, dévoila sa tactique au grand jour. Il aligna une
série de déflagrations propres à désembuer les châssis d’alu et, probablement
même, à faire décoller un Boeing 747
sans une goutte de kérosène pendant la phase de pointe d’un cyclone subtropical !
Heureusement, ayant subodoré – qu’on me pardonne- le traquenard, je m’étais
réservé de quoi riposter sachant que, comme au football, les buts marqués
« à l’extérieur » comptent double. Sans piper mot, je balançai ma
réplique, un peu, je dois l’avouer, à l’aveuglette, sans me soucier des
éventuels dégâts collatéraux. Le coup fit l’effet d’un roulement de tonnerre du
côté du Schnepffenried avec rebondissement decrescendo de vallées en vallons,
en veux-tu, en voilà. Je n’étais pas mécontent du tout de cette contre-attaque
et, un peu comme aux échecs, avant même que l’adversaire ait joué, j’échafaudai
d’ores et déjà ma stratégie du coup suivant, stratégie qui, comme on sait, a l’
avantage d’agacer et, en fin de compte, de dérouter l’adversaire. C’est à ce
moment précis que la voix suave et veloutée se fit à nouveau entendre au
travers des hauts parleurs : « Your attention please. Passengers to Vancouver, flight AC
221, immediate boarding gate 12. » Que diable allait-il faire à vent couvert dans
ce cloaque ouvert à tous les vents? Et bien, c’est bien mal connaître les
sujets de sa Majesté ! Loin d’ agiter le drapeau blanc et de se rendre
tout bonnement comme l’eût fait n’importe quel autre raisonnable ennemi, ce
fieffé maraud, pris par une poussée frénétique sur son flanc droit, me clama
depuis le fond de son cul de basse fosse : « Hey, old chap,
listen to this one !! » et, là, il décocha un tel coup de semonce
que, de mémoire de l’ensemble de l’installation , on entendit pareille
déflagration et, comme par enchantement, tous les appareils sanitaires présents
se mirent à glouglouter d’admiration, et Dieu sait s’ils en avaient vu de
toutes les couleurs dans leur existence…je dois à la vérité de dire que, si je n’avais pas été envahi à cet instant
par une vague de chauvinisme primaire et si j’avais eu les mains libres, j’eusse
eu malgré tout envie d’applaudir mais, c’est à ce moment-là que la voix des
hauts parleurs, toujours aussi camphrée, annonça : « Your
attention please. Passengers to Abu-Dhabi,
flight EA 95, immediate boarding gate 29”
. Non, je
n’étais pas encore à bout d’habits, pas totalement, mais j’étais surtout à bout
de souffle et à bout de nerf : c’est ça la guerre des nerfs. Je pensais –
tout en pansant mes plaies – à ces poilus de la
Grande Guerre qui échangeaient des tirs fournis avec l’ennemi, si proche
parfois qu’ils l’entendait parler à voix normale, et qui passaient des semaines,
voire des mois, dans leur tranchée transformée en cuvette chargée d’immondices,
de rats et de boue et que, j’avais,
finalement, de la chance de me trouver dans les latrines du tout puissant
London International Airport, les fesses au chaud, malgré le cuisant revers que
je venais d’essuyer. Pour clore la débâcle, mon adversaire, avant de tirer sa
révérence, tira la chasse – en s’y reprenant à deux fois, à propos de quoi je ne ferai aucun
commentaire – puis sortit précipitamment non sans m’avoir octroyé un
dernier : « Well, goodbye,
my friend. I
look forward to meeting you sometime for a new contest...! ».
La porte
claqua sèchement après avoir laissé filtrer quelques secondes le brouhaha du
grand hall affairé, puis le silence retomba comme une chape de plomb sur le
champ de bataille meurtri de cratères fumant. Ce fut l’heure du bilan : il
n’était pas brillant. Dieu merci, aucune perte ne fut enregistrée mais la
défaite était psychologique et je quittai ce lieu avec l’étrange sentiment
d’avoir revécu la bataille de Waterloo et, qu’on me pardonne, la queue un peu
basse.
(1)
Pour ceux qui l’ignorent,
« Loo », en langage familier britannique, signifie « Toilettes ».
Toute allusion à la belle poésie de Victor Hugo est fortuite !
Londres, janvier 1986
Inscription à :
Articles (Atom)